Référendum chez Smart : la CFDT refuse le marché de dupes
La CFDT s’oppose à la direction de l’usine mosellane, qui propose d’augmenter la durée du temps de travail au motif fallacieux de préserver l’emploi sur le site. Face à ce chantage, des explications s’imposent.
Le torchon brûle dans l’usine Smart de Hambach (Moselle), depuis le référendum organisé, le 11 septembre dernier par la direction auprès des 800 salariés, proposant le marché suivant : une augmentation du temps de travail (revenir aux 39 heures payées 37) en échange du maintien de l’emploi sur le site jusqu’en 2020. Une consultation qui a recueilli 56% d’avis favorables de la part des salariés. Mais qui provoque la réprobation des organisations syndicales de l’entreprise, CFDT et CGT en tête. Pourquoi ? « Parce qu’économiquement, l’entreprise va bien. Il n’y a aucune raison de faire planer une menace sur la survie du site. Nous ne sommes pas dans le cas de figure d’un accord de maintien de l’emploi », dénonce Alain Gatti, secrétaire général de l’Union régionale CFDT de la Lorraine.
Ces accords, initiés par la loi de sécurisation de l’emploi, permettent en effet de renégocier le temps de travail, mais dans des cas avérés de graves difficultés économiques, le temps que l’entreprise sorte la tête de l’eau. Or chez Smart, et c’est ce qui fait monter les syndicalistes au créneau, la principale motivation de la direction est en fait de gagner en productivité, face à la concurrence d’autres sites de production du groupe Daimler. Et notamment du site slovène de Novo Mesto, dont les coûts de production sont inférieurs. « Nous ne pouvons accepter ce procédé de la direction : nous sommes dans un cas de figure où il s’agit de baisser le coût horaire du travail, pour donner des gages à la maison mère, Daimler, afin de renforcer la compétitivité du site dans le but d'organiser une concurrence malsaine entre ses différentes usines », explique Philippe Portier, secrétaire général de la Fédération de la métallurgie CFDT (FGMM).
Déni de dialogue social
C’est aussi contre le procédé choisi par la direction pour cette consultation que les organisations syndicales se sont élevées. « Cette forme de démocratie directe, qui contourne les organisations syndicales représentatives, c’est tout simplement un déni des principes fondateurs du dialogue social », s’emporte Alain Gatti. En tout état de cause, le référundum, tel qu’il a été mené, n’a en soi ni valeur juridique ni valeur contraignante. La direction ne saurait s’en prévaloir pour mettre son projet en œuvre, et modifier les horaires de travail. Pour cela, elle doit poursuivre les négociations avec les syndicats et obtenir un accord majoritaire. Mais rien de prouve que le processus pourra aboutir.
Divisions internes
Car en interne, le scrutin a révélé de forts clivages, non seulement entre les salariés : si les cadres, employés, techniciens et agents de maîtrise ont été 74% à approuver l'accord, 61% des ouvriers se sont prononcés contre. Les divergences entre syndicats sont aussi très vives. La CFDT et la CGT ont annoncé qu'elles feraient usage de leur droit de veto que leur confère leur position majoritaire (plus de 50% des voix aux élections professionnelles, à elles deux), afin que l’accord, s’il est négocié, ne soit pas entériné. Le projet a donc peu de chances d’aboutir. Et dans l’usine, un climat délétère s’est instauré. Une histoire pas très « smart » en fait…